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Moi, proviseure (2024), Mahi Traoré

Publié par Concours personnel de direction sur 16 Février 2025, 20:19pm

Catégories : #Livres

Moi, proviseure… Journal impertinent d’une cheffe d’établissement combative, (2024), Robert Laffont.

Dans Moi, proviseure (2024) Mahi Traoré raconte « ses » grands moments à la tête du lycée polyvalent Lucas de Nehou, petit établissement parisien, spécialisé dans la formation aux métiers d’art du verre et du vitrail. La cheffe d’établissement, ex-CPE, donne rapidement le ton ; elle a rêvé d’exercer ce métier et le pouvoir. L’ouvrage s’organise autour de huit parties : le métier, la rentrée scolaire, les relations avec les parents, la démocratie lycéenne, le pilotage post-évaluation, la laïcité, l’égalité garçons-filles et le processus d’orientation avec les conseils de classe. Clairement, on a affaire à une proviseure qui prend les choses en main, affirme son autorité et engage son établissement autour de « ses valeurs ». Pour Mahi Traoré « les élèves sont ma priorité absolue, le reste passe après. (…) Je n’imagine pas m’enfermer dans mon bureau du matin au soir pour rédiger des rapports, peaufiner des tableaux statistiques. (…) Ma boîte e-mail professionnelle croule sous les messages de relance. ».

La proviseure n’aime ni les technos, ni les professeurs ronchons enfermés dans leurs routines. Son boulot, c’est d’accompagner ses élèves vers la réussite, de souder la communauté scolaire, d’améliorer l’image de son établissement, et de protéger ses personnels, notamment des parents intrusifs ou des risques de violence. Par son parcours, Mahi Traoré, d’origine malienne, montre la possibilité de s’arracher à sa classe sociale et à un destin genré de femme noire. Elle travaille au quotidien avec « ses équipes » à l’égalité des chances et refuse toute discrimination (racisme, homophobie, …). Elle a choisi son camp, le pilotage par les valeurs, même si, comme tout chef elle ne les perd jamais de vue les résultats ! Dans le chapitre consacré à la laïcité, la proviseure rappelle qu’elle ne doit pas être célébrée seulement le 9 décembre car elle peut devenir le cœur du projet d’établissement. La laïcité ouvre en effet un espace de discussion et de débat avec les élèves et participe, si les actions sont bien pensées par les équipes, au développement d’une citoyenneté active. Parce qu’elle a été CPE, Mahi Traoré croit dans les vertus de la démocratie lycéenne et au rôle des élections des délégués pour promouvoir la démocratie représentative. Outre des valeurs bien ancrées, l’auteure le souligne : pour diriger un établissement scolaire, une des qualités attendues c’est le courage, par exemple pour affronter les parents stratèges et donneurs de leçons des CSP+.

Modèles féminins

Notre profession a besoin de modèles féminins inspirants et Mahi Traoré a raison de prendre la plume car, à la tête des grands bahuts, les hommes restent nombreux : « Bien des femmes, dans notre administration, présentent toutes ces qualités. (…) On les voit rarement pousser les portes de leur hiérarchie pour postuler, alors que les leurs collègues masculins n’hésitent pas à exiger, à tempêter, à se hausser du col ».

L’ouvrage, écrit sur le mode de la conversation, avec aussi ses tics de langage (1) se lit facilement. Sur le fond, une réserve de taille : Mahi Traoré oppose de façon caricaturale les savoirs d’expérience et les savoirs académiques : « dans mon métier, les solutions ne sortent pas toutes faites des ouvrages que nous avons étudiés en formation », oubliant la nécessité pour les pédagogues et les éducateurs de se tenir informés des acquis de la Recherche, oubliant que des chercheurs ou praticiens proposent des méthodologies ou des répertoires professionnels pouvant faire gagner un temps précieux aux personnels de direction. D’ailleurs, cette posture n’est pas cohérente avec la décision de la proviseure d’employer des coachs, biberonnés aux théories du management, pour améliorer la communication et la qualité de vie au travail (QVT) des équipes !

Si l’ouvrage est convaincant par son énergie et la richesse des situations professionnelles évoquées, le lecteur pourra rester sur leur faim. Mahi Traore survole parfois les questions, qu’il s’agisse du pouvoir du chef d’établissement, de la place des parents, du rôle des instances, de la démocratie lycéenne, etc.

Au final, notre collègue signe un livre-témoignage enlevé et tonique qui célèbre « l’effet chef d’établissement ». Et personne - professeurs, élèves ou parents de Lucas-de-Nehou – ni les lecteurs ne nieront qu’il existe bel et bien !

 

 

(1) De trop nombreux « mais » par exemple. Sans doute le livre a-t-il bénéficié d'un appui pour son écriture. C'est souvent le cas chez les collègues publiant des ouvrages. 

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