La prévention de l'échec scolaire doit se faire d'abord en classe. (...) Paradoxalement, faute d’une connaissance suffisante des acquis de la Recherche, ce sont les professeurs qui sont les moins convaincus de « l’effet maître » sur les apprentissages parce qu’ils surestiment l’impact du capital scolaire des parents sur la réussite des élèves.
La lutte contre le décrochage scolaire se gagne d’abord en agissant sur les élèves à risque, et cela suppose une puissante mobilisation collective. La proportion d’élèves en difficulté - hors éducation prioritaire - peut représenter 10 à 20 % des effectifs d’un collège. Pour un établissement de 300 élèves, il s’agit d’accompagner pas moins de 60 élèves. Pour un collège « 500 », le nombre va grimper à 100, soit l’équivalent de plus de 3 classes de 30 élèves, c’est considérable ! On comprend pourquoi la prévention de l’échec scolaire doit se faire d’abord dans la classe.
L’évolution des pratiques pédagogiques, qu’elles concernent les pratiques d’enseignement ou les pratiques d’évaluation, est le véritable enjeu. Les professeurs doivent s’engager dans une véritable pédagogie de l’égalité des chances en ne sous-traitant ni les apprentissages, ni les devoirs aux familles. Cela suppose d’abord de s’attaquer à la difficulté scolaire en classe en s’appuyant sur la pédagogie différenciée ou la pédagogie coopérative par exemple, cela passe par limiter le travail écrit à la maison de façon drastique et faire les révisions en classe pour préparer les contrôles (évaluations formatives), s’assurant ainsi que chaque élève dispose d’un minimum de connaissances ou compétences pour réussir.
Donner du travail noté à la maison revient, nous le savons, à creuser les écarts. Une meilleure gestion du groupe et du temps permet de travailler et d’évaluer en classe. Les programmes peuvent être lourds mais c’est à l’enseignant de faire des choix, on peut consacrer à un point du programme une demi-heure ou trois heures. Un dernier chiffre brisera toute illusion : les lycéens déclarent travailler en moyenne 59 minutes jour, un tiers d’entre eux moins de 30 minutes. Les élèves ne sont pas prêts à renoncer aux écrans pour laisser plus de place aux devoirs ou aux recherches.
En fixant comme objectif que les devoirs doivent être faits à l’Ecole, l’objectif du ministre est pertinent mais on devrait toutefois préciser « en classe avec chaque professeur qui les donne » ! Le dispositif « devoirs faits » ne suffira pas car il faut aussi déconstruire des habitus professionnels bien ancrés et des attitudes fatalistes vis-à-vis de l’échec scolaire. Paradoxalement, faute d’une connaissance suffisante des acquis de la Recherche, ce sont les professeurs qui sont les moins convaincus de « l’effet maître » sur les apprentissages parce qu’ils surestiment l’impact du capital scolaire des parents sur la réussite des élèves.
Texte est extrait de Quatre études de cas pour préparer le concours de personnel de direction